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lundi 25 août 2014

Entretien avec Helvetia Vicina



- Les coprésidents de l'association pour l'énergie du Jura et du Jura bernois (à lire ici), parlent du psychodrame éolien lorsqu'ils évoquent les milieux de l'opposition. Que leur répondez-vous?

- Qu'en utilisant de pareils termes ils participent grandement à ce psychodrame. L'opposition n'est pas là pour être combattue dans une démocratie, mais pour participer à la réflexion.

- Lorsqu'ils avancent que l'éolien est la source actuellement la plus puissante et la moins onéreuse après l'hydraulique, cela ne vous fait pas réfléchir.

- Je voudrais bien réfléchir, mais ils ne m'en donnent pas la possibilité. Comment se fait-il que sans même produire un seul kwh, les projets de parcs éoliens de SIG ont déjà coûté près de 47 millions de francs juste pour le Jura et Neuchâtel? Quelques autres millions se sont perdus du côté du Valais je crois. De quels coûts parlent-ils? Avec ou sans RPC?  Des coûts bas pour qui? Les consommateurs ou les producteurs? On peut tout dire dans un article, mais on explique rarement ce que l'on avance, la Tribune de ces messieurs dans le Journal du Jura du 21 août en est un bel exemple. Si l'éolien était ce qu'ils avancent, l'Allemagne ne serait pas l'épine dans le pied du marché de l'électricité en Europe et la précarité énergétique ne serait pas un sujet il me semble.

- L'éolien peut être parfaitement accepté par la population. Le site du Mont-Crosin en est un bel exemple. N'est-ce pas un fait?

- J'ai rencontré des opposants du Mont Crosin. Le problème n'est pas qu'il n'y a pas d'opposition. Le problème est qu'aujourd'hui peu de gens osent s'exprimer contre l'opinion publique. Le terrain là-haut est travaillé depuis longtemps. Il y a des enjeux économiques maintenant qui ont été mis en place avant l'arrivée des machines de dimensions  industrielles. Je sais qu'une commerçante souffre du syndrome éolien mais ne le dit qu'à ses amis proches, parce qu'elle a peur des retombées sur son échoppe. Peut-on appeler cela de l'acceptation? C'est de la soumission aux règles qui sont imposées. J'aurais honte de nier ce genre de cas, nombreux sous les éoliennes du Mont-Crosin et du Mont-Soleil. Ces messieurs abusent de leur position sociale pour cacher une réalité difficile à vivre pour ceux qui subissent ce type de diktat.

- Dans leurs conclusions, Messieurs Gschwind et von Kaenel,  assurent que le Jura regorge de possibilité pour produire de l'énergie et qu'il faut toutes les utiliser. Cela semble sage à l'heure de la sortie du nucléaire et de la raréfaction des ressources fossiles.

- Mais absolument rien dans le monde actuel ne nous montre que l'utilisation des énergies fossiles est en diminution. Même là où les énergies renouvelables sont ultra développées! Que l'on cesse de nous boucher la vue avec des rêves! Même l'Allemagne recourt honteusement au charbon!  Et si ces messieurs pensent qu'il n'y a qu'à, qu'ils rasent les campagnes et jettent sur les routes ceux qui ne partagent pas cette vision d'une société durable! Nous vivons ici et maintenant, nous aimons notre environnement et nous ne souhaitons pas le céder aux principes d'un capitalisme outrancier et ravageur. Les projets jurassiens n'ont rien à voir avec de l'autonomie énergétique, ils ne serviront que des sociétés qui trépignent sur la ligne de départ de la libéralisation du marché de l'électricité en Suisse, avec des miettes pour la région. Nous voulons des projets locaux, respectueux des hommes et des animaux, de la terre et des eaux. Pas la peine de tout saccager pour une pseudo sortie du nucléaire et des énergies fossiles. Laissons déjà les particuliers produire et consommer leur propre énergie avant de venir leur faire la morale et de les traiter d'égoïstes.  De qui se moque-t-on à la fin? Un projet de société n'est pas un projet de sociétéS. Que l'on arrête de prendre les citoyens pour des cons et que l'avenir ne se décident plus en costumes cravates et dans des conseils d'administration ou des conseils communaux, mais  avec les principaux concernés!

-Vous semblez aussi fâchée avec les opposants... N'êtes-vous pas extrémiste?

- Si être extrémiste c'est prendre la parole en assemblée communale et demander des explications sur les mensonges du maire ou les magouilles des promoteurs, oui je suis extrémiste. Si être extrémiste c'est refuser de voir des vautours de la finance s'emparer de mon environnement en faisant semblant de le faire pour mon bien, oui je suis extrémiste. Si être extrémiste c'est être émue devant ces centaines de riverains d'éoliennes qui subissent après avoir fait confiance, oui je suis extrémiste. Si être extrémiste c'est se sentir trahie lorsque ceux qui  disent lutter à vos côtés se débinent par confort, oui je suis extrémiste. Et si c'est cela être extrémiste, alors c'est grave. C'est que nous avons perdu notre capacité de réagir dignement face à l'injustice et aux manipulations du pouvoir.  Je ne suis pas fâchée avec les opposants, je suis déçue  par leur difficulté à afficher leur conviction et à remettre en question le système. Les français gagnent de belles batailles contre l'industrie du vent parce qu'ils assument leur minorité. Au Mexique, le mouvement pour la défense des droits de l'homme dénoncent les manoeuvres des promoteurs éoliens contre les peuples. Ici, en Suisse, personne ne veut froisser personne, cela a le don de m'exaspérer. Le peuple croit qu'il est encore considéré et qu'il sera respecté. Moi je n'y crois pas. L'acharnement des partis de droite à défendre le développement des énergies renouvelables dans des régions décentralisées semble bien trouver son explication ici 
et pas dans une soudaine prise de conscience de notre dépendance au nucléaire et de sa dangerosité. Le marché de l'électricité s'ouvre, la transition énergétique permet de construire de nouveaux sites de production à vendre sur le réseau européen. De plus elle justifiera l'extension du réseau à très haute tension. Cherchez qui paie et qui encaisse et vous trouverez la source des motivations écologiques de nos députés! Fukushima ne fut qu'un prétexte pour accélérer le processus de la  libéralisation que le peuple a refusé en 2002,  avec en bonus des subventions à gogo pour la financer... 

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