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mercredi 9 novembre 2022

Chanter c'est vivre un peu plus... (Michel Bühler)

 


Sa première visite a frappé d'or les pavés de cette lutte.

Il n'était pas encore convaincu de vouloir se battre contre les éoliennes industrielles, il espérait de ses machines une réponse contre le nucléaire et les énergies fossiles, il ne voulait pas laisser passer cette chance sans approfondir sa réflexion. Il est donc venu un dimanche, nous sommes montés jusqu'aux éoliennes géantes du village à pied. Il avait le souffle court, m'expliquant qu'il avait quelques soucis de ce côté-là. J'étais honorée de sa visite, de son intérêt mais j'étais aussi profondément blessée par les mois de lutte qui précédaient cette rencontre, pas au mieux de ma forme sociale on va dire. Mais sa douceur, son écoute et la distance qu'il gardait encore face à nos griefs on rendu les choses plus faciles. Quand il est reparti je ne savais pas ce qu'il retiendrait de cette visite, mais j'étais contente de l'avoir rencontré. Il a laissé un éclat de lumière sur cette journée.

Je l'ai retrouvé à peine plus tard dans les rangs des opposants à ce saccage sans précédent qui menacent les Crêtes du Jura. Sa réflexion avait fait son chemin, il nous avait largement dépassé même dans ses convictions et il s'est engagé avec ses tripes et avec son coeur, sans compter, avec un seul objectif: ne rien lâcher pour sauver ce coin de pays de la voracité des investisseurs.

Comme nous il a dû  être surpris par la violence de ce qui s'abattait sur nos vies: les mensonges des puissants promoteurs,  leurs capacités de nuire, de détruire, d'anéantir avec la complicité des politiciens, tout ce qui servait leurs intérêts ou qui les mettait en échec. Comme nous, il a payé un lourd tribut à ces charognards (personnes qui exploitent impitoyablement le malheur des autres), il a payé de sa santé sa résistance, il a sans doute perdu des amitiés, il était sur le point de perdre un lieux qui lui était précieux et peut-être même a-t'il perdu un peu de sa foi, celle qui faisait de lui une personne digne et sensée, qui se sentait concernée par le monde, prête à s'engager pour le respect de valeurs humaines et démocratiques. Comme nous il a dû tomber de haut, je le lisais et je reconnaissais ces étapes douloureuses que nous avions vécues quelques années plus tôt, j'avais toujours envie de lui dire de lâcher prise, je me faisais du soucis pour lui. Mais aussi je savais à quel point nous étions incapables de lâcher, sachant que seule notre pugnacité pouvait surprendre nos adversaires, qui eux ne se nourrissent que de lois et de manipulations pour arriver à leur fin, ils ne connaissent de combats que ceux dictés par l'argent et/ou le pouvoir.

Je suis reconnaissante d'avoir croisé ta route Michel et infiniment triste et décontenancée par ta disparition si subite et si cruelle. Tu as pris faits et causes pour les injustices et pour l'amour toute ta vie,  tu devais mourir en paix dans ton beau pays que tu aimais tant, au lieu de cela tu as mis toutes tes dernières forces pour le sauver. Aujourd'hui je suis en colère contre ces immenses connards qui ont qualifié ton acte pacifique et héroïque, lorsque tu t'es couché devant les bulldozers à Sainte-Croix, comme étant "d'une violence inouïe." C'était si mal te connaître, enfin cela démontrait surtout à quel point ils se moquent de l'humanité qui nourrit la lutte contre leurs projets éoliens. Peu de journaux et peu de tes amis d'avant osent parler dans les hommages qu'ils te rendent de l'immense force que tu as mise contre le parc éolien de Sainte-Croix les derniers mois de ta vie. Quel manque de clairvoyance et quelle couardise.

Nous lèveront le poing encore plus haut, en mémoire de ton courage et de la douceur que tu incarnais et qu'ils ont méprisés.

Tu continueras de chanter pour nous. Merci.

2 commentaires:

  1. Merci Chère Voisine...
    J'ai toujours cru que rien de mal ne pouvait arriver à Sainte-Croix, puisqu'il était là. Et puis maintenant, j'ai l'impression d'avoir entendu le grand chêne qui nous veillait tous s'abattre. Il m'en faudra du temps pour imprimer qu'il est parti. Michel, puisse ton souvenir nous galvaniser encore plus dans cette lutte. Je suis contente d'avoir lutté à tes côtés, nous sommes toujours sur la route, nous continuons! Merci, hasta luego, mais pas tout de suite...

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  2. Vent de Folie en deuil

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