Populisme, Elsa Guquelin |
L'élection de Donald Trump a mis en évidence la montée en puissance du populisme à travers le monde. Il a fallu cet électrochoc pour comprendre que le danger n'était pas maîtrisé du tout et que la démocratie n'était pas acquise. *La tribune d'Andreas Gross publiée le 4 février dernier dans le Quotidien jurassien "Démocratie contre populisme" arrive peut-être déjà trop tard. Le populisme a fait ici aussi une avancée spectaculaire.
Le parti de l'Union démocratique du centre est le fer de lance du populisme, mais les autres partis ne sont pas en reste. C'est le constat le plus décevant que j'aie pu faire en devenant une opposante aux éoliennes. En lisant ce passage dans l'écrit de Monsieur Gross, un tas d'événements me sont remontés à la gorge:
"Comme la politologue allemande Karin Priester il y a dix ans, son collègue Jan-Werner Müller relève dans son dernier essai les contenus antidémocratiques du populisme actuellement florissant en Europe et son noyau: «Les populistes sont seuls à représenter le peuple.» Ceux qui ont d’autres idées sont exclus. Les populistes ignorent le pluralisme et la pluralité, qui constituent «le peuple» et la politique. Ils se considèrent au-dessus de tout le monde, les seuls, ceux qui savent mieux que les autres. "
Les réactions hostiles à mon égard, comme à l'égard de tous ceux qui se sont élevés contre les projets éoliens jurassiens, ont été surprenantes et relèvent directement d'attitudes populistes telles que décrites ci-dessus. Et ces réactions émanaient de toutes parts:
Un député vert m’a traité d’hystérique, sans m’avoir jamais rencontrée. Un membre de combat socialiste de folle, un autre élu membre du parti des verts lors d’une assemblée communale à Saint-Brais, nous a prié de, je cite : « fermer nos gueules et d’arrêter de faire chier » lorsque nous posions des questions au sujet d’un projet éolien dans la commune. Un maire PCSI a fait un doigt d’honneur à une citoyenne étonnée de le voir arracher rageusement des affiches anti-éoliennes. Combien de questions sans réponses adressées à des ministres? Combien de députés agressifs à notre encontre? J’en passe et des pires. Le simple fait d’exprimer notre opposition donne à des élus le droit de se conduire comme des gougeats et d’oublier tous les principes de la démocratie et leur devoir. À mon sens la dérive populiste est non seulement réelle mais en plus elle vient de droite comme de gauche. Lui attribuer un parti, c'est prendre le risque de minimiser l'ampleur des dégâts. Mais essayez de dénoncer dans la presse des attitudes inadaptées de la part d'élus: plutôt que d'en faire un sujet, elle vous priera d'enrober vos propos de sucre pour ne pas froisser les susceptibilités... Circulez, il n'y a rien à dire. Et pendant ce temps le populisme s'installe et les bras se lèvent vers le ciel en signe de consternation! Quelle comédie.
Si on veut vraiment lutter contre ce fléau, commençons par instruire les élus sur la démocratie avant de les lâcher à la tête des communes et des gouvernements. Quant à la presse espérons qu'elle dissipera un jour le brouillard qui caviarde ses informations.
*
LA MOSAÏQUE DE LA DÉMOCRATIE
Démocratie contre populisme
ANDREAS GROSS Atelier pour la démocratie directe, Saint-Ursanne
En politique aussi, la nouveauté n’est parfois pas vraiment
neuve. Et cela même si on ne semble jamais avoir été confronté autant
qu’aujourd’hui au populisme et aux populistes.
En France, l’icône des populistes Marine Le Pen pourrait même devenir présidente de la République dans trois mois. En Autriche, la même chose a été évitée de peu il y a trois mois. En Grande-Bretagne, un populiste a gagné un plébiscite anti-européen. Aux Pays-Bas, le populiste Geert Wilders pourrait remporter les élections dans cinq semaines. En Allemagne, les populistes aspirent à décrocher la troisième place cet automne, devant les Verts, la gauche et les libéraux. L’Italie a produit avec l’ancien président Silvio Berlusconi l’avant-garde du populiste affairiste. Son double américain milliardaire a également triomphé et s’éclate chaque jour en audience planétaire depuis deux semaines à la Maison-Blanche. En Hongrie et en Pologne, des majorités gouvernementales populistes nous font découvrir les «démocraties illibérales». En Turquie, un autocrate populiste veut s’arroger encore plus de pouvoir présidentiel et, malgré l’état d’urgence, faire voter sur une nouvelle constitution. Et en Suisse, l’UDC populiste forme le 1 groupe politique du Conseil national et injurie ceux qui ont majoritairement un autre avis comme «méprisant le peuple» et «traîtres à la constitution».
Jamais autant de «populisme» ne s’était étalé. Malgré sa mauvaise réputation. Car peu de gens s’en réjouissent. Beaucoup en frémissent plutôt. Mais pourquoi au juste? Parce qu’ils ne savent pas comment la société pourrait le combattre.
Voilà un peu moins d’un demi-siècle à Londres, on a cherché des réponses correspondantes lors d’une conférence intitulée «Un spectre rôde – le populisme». À l’époque déjà, trois choses sont apparues: le populisme se comprend très différemment des deux côtés de l’Atlantique. Aux États-Unis, il existe une tradition de mouvements (populaires) progressistes, «populistes» et pourtant diversifiés, qui ont œuvré pour la démocratisation de la société dans les années 1830 et 1890. Ils sont comparables aux mouvements démocratiques qui ont agi dans les cantons suisses dans les années 1860, parvenant à imposer la démocratie directe. Pour cette raison, la notion de populisme a une image positive aux USA.
En second lieu, le populisme exprime une crise de la démocratie, plus exactement des représentants du peuple. Beaucoup de gens ne se sentent plus représentés par les anciens grands partis et les parlementaires. Et, troisièmement, le populisme n’est pas seulement une forme de discours – simplificateur, personnalisé, agressif, émotionnel, stigmatisant.
Comme la politologue allemande Karin Priester il y a dix ans, son collègue Jan-Werner Müller relève dans son dernier essai les contenus antidémocratiques du populisme actuellement florissant en Europe et son noyau: «Les populistes sont seuls à représenter le peuple.» Ceux qui ont d’autres idées sont exclus. Les populistes ignorent le pluralisme et la pluralité, qui constituent «le peuple» et la politique. Ils se considèrent au-dessus de tout le monde, les seuls, ceux qui savent mieux que les autres. Cette tendance à l’exclusion est renforcée par des positions extrêmement nationalistes, xénophobes et égocentriques.
Pour stopper les populistes, il ne nous faut pas moins, mais davantage de démocratie. Seuls l’extension internationale et l’approfondissement de la démocratie permettront de la renforcer afin que les gens retrouvent le pouvoir de déterminer leurs conditions de vie et de se débarrasser des tentations populistes.
LQJ04/02/2017
En France, l’icône des populistes Marine Le Pen pourrait même devenir présidente de la République dans trois mois. En Autriche, la même chose a été évitée de peu il y a trois mois. En Grande-Bretagne, un populiste a gagné un plébiscite anti-européen. Aux Pays-Bas, le populiste Geert Wilders pourrait remporter les élections dans cinq semaines. En Allemagne, les populistes aspirent à décrocher la troisième place cet automne, devant les Verts, la gauche et les libéraux. L’Italie a produit avec l’ancien président Silvio Berlusconi l’avant-garde du populiste affairiste. Son double américain milliardaire a également triomphé et s’éclate chaque jour en audience planétaire depuis deux semaines à la Maison-Blanche. En Hongrie et en Pologne, des majorités gouvernementales populistes nous font découvrir les «démocraties illibérales». En Turquie, un autocrate populiste veut s’arroger encore plus de pouvoir présidentiel et, malgré l’état d’urgence, faire voter sur une nouvelle constitution. Et en Suisse, l’UDC populiste forme le 1 groupe politique du Conseil national et injurie ceux qui ont majoritairement un autre avis comme «méprisant le peuple» et «traîtres à la constitution».
Jamais autant de «populisme» ne s’était étalé. Malgré sa mauvaise réputation. Car peu de gens s’en réjouissent. Beaucoup en frémissent plutôt. Mais pourquoi au juste? Parce qu’ils ne savent pas comment la société pourrait le combattre.
Voilà un peu moins d’un demi-siècle à Londres, on a cherché des réponses correspondantes lors d’une conférence intitulée «Un spectre rôde – le populisme». À l’époque déjà, trois choses sont apparues: le populisme se comprend très différemment des deux côtés de l’Atlantique. Aux États-Unis, il existe une tradition de mouvements (populaires) progressistes, «populistes» et pourtant diversifiés, qui ont œuvré pour la démocratisation de la société dans les années 1830 et 1890. Ils sont comparables aux mouvements démocratiques qui ont agi dans les cantons suisses dans les années 1860, parvenant à imposer la démocratie directe. Pour cette raison, la notion de populisme a une image positive aux USA.
En second lieu, le populisme exprime une crise de la démocratie, plus exactement des représentants du peuple. Beaucoup de gens ne se sentent plus représentés par les anciens grands partis et les parlementaires. Et, troisièmement, le populisme n’est pas seulement une forme de discours – simplificateur, personnalisé, agressif, émotionnel, stigmatisant.
Comme la politologue allemande Karin Priester il y a dix ans, son collègue Jan-Werner Müller relève dans son dernier essai les contenus antidémocratiques du populisme actuellement florissant en Europe et son noyau: «Les populistes sont seuls à représenter le peuple.» Ceux qui ont d’autres idées sont exclus. Les populistes ignorent le pluralisme et la pluralité, qui constituent «le peuple» et la politique. Ils se considèrent au-dessus de tout le monde, les seuls, ceux qui savent mieux que les autres. Cette tendance à l’exclusion est renforcée par des positions extrêmement nationalistes, xénophobes et égocentriques.
Pour stopper les populistes, il ne nous faut pas moins, mais davantage de démocratie. Seuls l’extension internationale et l’approfondissement de la démocratie permettront de la renforcer afin que les gens retrouvent le pouvoir de déterminer leurs conditions de vie et de se débarrasser des tentations populistes.
LQJ04/02/2017
Chemins de traverse
RépondreSupprimerSeule je voyage sur les chemins de traverse
J’ai couru longtemps
Encore et encore
Le ventre vide
Les yeux noyés de visions terrifiantes
Les pieds en sang
Je ne savais même plus que je courrais encore
Epuisée
Puisée par le passé qui comme une hyène
Cherchait à mordre mes talons
Plus l’urgence d’avancer était là
Plus elle me rattrapait et me tannait
Tout ce que j’ai laissé derrière moi
Devient une ombre fragile et mouvante
Emouvante
L’horizon s’éloigne sans cesse davantage
Toujours plus vite
Dans un mouvement perpétuel
Ligne imaginaire, molle et incertaine
Alors que rien ne bouge
Alors que tout explose
Et que la gorge hurle en silence
Le corps veut se fracasser
Cassé
Lassé
Contre les arbres rugueux
Les ongles veulent arracher la peau
Qui vibre et ressent trop fort
Les mains veulent poignarder la chair
Qui n’a plus de chemin et meurt dans les ténèbres
J’étais partie pour la liberté
Me voilà prisonnière
Aboyant et rampant
Dans le chaos des jours interminables
Minables
C’est une course contre le temps
Le temps de reprendre haleine
Sans savoir qui de la vie ou de la mort gagnera.
Toi qui dors dans tes certitudes
Tu marches avec la meute
Tu ne sais pas que chaque instant est une poignée de sable
Qui retourne irrémédiablement à son rivage
Sables mouvants où le pied chavire
Vire et s’enfonce
Dans la plus profonde des solitudes
Tu marches docile et faussement rebelle ,
Policé, lissé, normalisé
Pesant de tout ton poids sur des béquilles
Et quand tu croises une âme insoumise
Tu ricanes et prends un air émancipé
Moi je marche sur les chemins de traverse
Hurler ne me fait pas peur
Les coups de crocs j’en ai reçu
De ceux qui ne laissent aucune trace
Sauf en plein milieu du cœur
Alors même dormir sur la terre froide
Est plus doux à ma peau
Que les fausses caresses qui éteignent le soleil
Seigneur des forêts
Couvre-moi de ton manteau
J’ai demandé à voyager loin
Et je sème un à un mes bagages
Quand je serais nue et dépouillée
Assez légère pour danser avec le vent
Ce sera l’heure d’un autre voyage.
Louve