mardi 20 août 2013

On ne change rien

Pendant que les uns se régalent, les autres trinquent ou s'apprêtent à trinquer.
Entre la ville de Delémont et la forêt, il reste une petite ceinture verte: des champs de culture que bordent les dernières villas de la commune. La tentation est grande d'ouvrir ces terres fertiles aux promoteurs immobiliers et de poursuivre l'oeuvre de l'homme: bétonner, entasser, transformer l'horizon en logements sous prétexte de développement. La forêt quant à elle devra accueillir toutes les espèces animales repoussées de ces vertes contrées et les centrales électriques qui alimenteront ce petit monde déplacé des villes vers les campagnes. Parce que Delémont fait sa pub sur le fait qu'elle est une ville à la campagne et espère ainsi offrir près de mille nouveaux logements à ceux qui de Bâle ou d'ailleurs recherchent un peu de verdure et de simplicité. Jusqu'à maintenant ça marche. Les ex-citadins s'extasient sur les charmes de la petite cité et ne tarissent pas d'éloges sur les conditions qu'ils y trouvent. Les autochtones applaudissent la fulgurante transformation de leur environnement. Les artisans, les commerçants sont aux anges.

Personne ne veut se poser la question du lendemain. Après, quand tout sera construit, quand la ville ne sera plus à la campagne, quand les crises que l'on sait proches, telle que la crise alimentaire, la crise énergétique, seront effectivement là avec la précarité qu'elles engendreront, où seront ces politiques de génie, ces artisans et ces commerçants qui auront vendu les terres et entassé les hommes sans penser plus loin que leurs comptes en banque?

Quel charme y aura-t-il de vivre ici, de voir sur toutes les cimes des hélices géantes et de toutes les fenêtres la cuisine de son voisin?  C'est une question qui me laisse perplexe.

Le plus navrant est le déni des uns et des autres. L'échec retentissant de la transition énergétique en Europe vomi ses premières victimes, montre l'exemple à ne pas suivre et l'urgence à trouver de nouvelles pistes pour l'avenir de l'humanité.  Et ici, dans un Jura où tout est encore possible parce que l'industrie ne l'a pas trop dévasté, on emboîte le pas de toutes les erreurs commises ailleurs.

Le gaz de schiste montre le bout de son nez, comme prévu, parce que les éoliennes et le solaire ne remplaceront jamais rien, ou si peu, en détruisant beaucoup, pourtant Delémont pousse sa transition énergétique à coup de cocoricos aussi retentissants que les articles de presse qui pleuvent sur les catastrophes générées par cet acharnement à confondre développement durable et solutions industrielles. Lorsque les promoteurs immobiliers rempliront leur carnet de commande sur les dernières terres cultivables de la ville, les voleurs de vent s'acharneront sur les crêtes qui la dominent. Il faudra alors convaincre cette population trompée que le moment est venu de creuser les entrailles des sols pour poursuivre la route à la rencontre de ce mur contre lequel s'écraseront les plus faibles, mais aussi quelques autres cette fois-ci.

Navrant. Affligeant. Ecoeurant. Et pourtant ils savent tous ce qu'ils font. La peur paralyse leur capacité de réaction et les fait faire la seule chose qu'ils savent faire: Continuer ce qui a été commencé pour les uns, obéir pour les autres.

Des détails sur le projet de nouveau quartier ici: www.creuxdelaterre.ch

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